Ou selon le décret du 21 janvier 1887, du général Georges Ernest
Jean Marie Boulanger, dit "Général Boulanger", qui voulait que l'on rebaptise chaque ouvrage militaire du nom d'une gloire militaire, si possible locale,
"Fort RANDON".


Situé sur la commune de Gières à une altitude de 420 m, faisant face au fort du Bourcet et croisant ses feux avec celui-ci pour barrer la vallée du Grésivaudan, le fort du Mûrier est celui qui fut le plus puissamment armé de tous les forts de l'agglomération grenobloise. Les études préliminaires à sa construction furent entreprises au début de 1873 et comprirent plusieurs avant-projets avant d'être approuvés par le Comité des fortifications en mars de cette même année. La Chefferie locale du Génie put alors étudier le projet définitif qui sera accepté par le Comité en avril 1875.

Entouré d'un profond et large fossé, sa forme en V largement ouvert encadrée de deux ailes parfaitement symétriques caractéristique de la première série des forts Séré de Rivières en fait un exemple d'école. D'une surface bâtie de l'ordre de 4 200 m², les bâtiments du fort - d'une surface utile de 3 658 m² - ouvrent sur une cour intérieure de 1000 m².

Le bâtiment "a" fait face au front d'attaque et comprend 11 chambres destinées à la troupe et aux sous-officiers, équipées chacune de 10 lits à 4 places (2 places en bas et 2 autres superposées). L'axe central sur lequel s'articule les deux branches du V avec un angle de 150° constitue un passage central et les 2 casemates jouxtant de part et d'autre ce passage étaient destinées pour celle à gauche à un magasin à vivres et à droite à la cantine. Ces casemates ouvrent sur la cour intérieure et sont éclairées par deux fenêtres situées de part et d'autre d'une porte. La structure générale de ces locaux est composée d'une série des voûtes à segments d'arcs en plein cintre prenant appui sur les murs de refends disposés perpendiculairement au front d'attaque.

Les deux extrémités de cette partie d'ouvrage sont occupées à gauche, par les bâtiments "b" et "c" qui servent de poudrières et dont les voûtes sont inversées par rapport aux casemates centrales constituant ainsi des butoirs latéraux. Les murs de refend, les voûtes, ainsi que le mur rideau constituant la façade sont construits en pierres de calcaire argilo sableux schitosé trouvées sur place, qui se sont avérées être de médiocre qualité, ont les caractéristique suivantes :

1,50 m pour le mur frontal soutenant les terres du glacis de protection des casemates ;
1,20 m pour les murs de refend ;
0,70 m pour le mur de façade et
0,50 m pour les voûtes recouvertes d'une chape de ciment, avec forme de pente vers des exutoires traversant les voûtes. L'ensemble de celle-ci étant protégé par une étanchéité d'asphalte surmontée d'un drain et recouvert ensuite par des terres de protection.

Les bâtiments "d" et "c" qui viennent fermer de part et d'autre la cour intérieure sont peu éloignés des précédents par leur disposition constructive, mais ont des destinations bien différentes. Le bâtiment "d", à gauche en entrant, abrite quelques magasins pour l'artillerie et l'intendance, mais aussi la cuisine avec ses magasins annexes et l'infirmerie, avec tisanerie pour une vingtaine de malades, ainsi que les latrines de la troupe. Les façades de ces bâtiments étaient animées par la disposition des pierres soulignant le cintre de la casemate posées suivant le rayon de l'axe de la voûte et par l'application, dans les tympans, d'enduits au mortier de chaux. Les portes et les fenêtres ont des piédroits et linteaux en brique, de teinte ocre légèrement rosée. Les appuis sont taillés dans un calcaire urgonien, de qualité médiocre, provenant des rebuts d'exploitation des carrières de Fontaine ou de Sassenage.

La porte d'entrée du fort - surmontée de son faux crénelage, ornée d'arcatures cintrées simulant des mâchicoulis - affiche les armes de Gières et deux plaques de marbre gravées, témoignages des actions de la Résistance.

Depuis la partie supérieure du fort , la vue s'étend sur toute la vallée du Grésivaudan, au premier plan la caponnière gauche et sous la place d'armes sortante, les arcs de décharge du mur de contrescarpe.

Sous les frimas de l'hiver, avant les travaux de restauration, le fort prenait parfois des allures fantomatiques qui convenaient parfaitement aux pierres avec lesquelles il était construit.

Le bâtiment "c", à droite de l'entrée, est en partie construit sur deux étages avec planchers en voûtains reposant sur I.P.N.. Les parties en simple rez-de-chaussée sont utilisées pour des magasins et du côté S.O. pour la boulangerie et ses magasins ; le four à pain pouvait produire 380 rations. La partie sur deux niveaux est destinée au logement des officiers du bureau du Génie et du télégraphe ; des latrines pour officiers et deux locaux disciplinaires. C'est sous ce bâtiment que se trouve installée la citerne de récupération de l'eau, équipée de filtre, d'une contenance de 270 m3.

Ces bâtiments "c" et "d" sont bordés sur leurs côtés extérieurs par des couloirs longeant intérieurement les murs d'escarpe qui conduisent vers les caponnières doubles qui flanquent les fossés, par des trémies de tir destinées à des canons à balles, des meurtrières pour les tirs au fusil, ainsi que des trémies de grenadage de pied .

Les deux caponnières sont reliées entre elles, au-dessus du mur d'escarpe par un chemin de ronde protégé par un mur avec meurtrières de tirs au fusil. On retrouve également ce mur sur les façades arrière des bâtiments officiers et infirmerie.

L'ensemble des bâtiments est complété par le bâtiment "f" destiné au corps de garde. Ce petit ouvrage, accolé de part et d'autre de petits bastionnets débordant dans le fossé et flanquant la porte d'entrée - qui fonctionne par un système à contrepoids - , assure le contrôle de l'entrée du fort et du pont basculant. Ce bâtiment est construit en schiste d'une qualité légèrement supérieure aux autres bâtiments et seule la porte d'entrée, bâtie en pierre de calcaire gris clair provenant vraisemblablement des stocks de matériaux de chantier ayant servis à la construction des bâtiments de la place de Verdun et qui provenaient des carrières du mâconnais ou du dijonnais, a mérité une attention particulière de la part des officiers constructeurs du Génie. Elle est ornée d'éléments décoratifs empruntés aux systèmes défensifs du Moyen age, tel le faux crénelage qui la surmonte.

Les ouvrages sont complétés à l'intérieur, de chaque côté de l'entrée, par des rampes d'accès permettant de hisser l'artillerie - canons très lourds, 4 500 Kgs pour les pièces de 155 - jusqu'aux emplacements de tirs situés entre les traverses abris surmontant les casemates du bâtiment "a".

Fournil de la boulangerie. Le four pouvait contenir 380 rations. Il était constitué d'un appareillage circulaire de pierres réfractaires en parfait état.

Enfin, un fossé large de 9 m de profondeur entoure les bâtiments et est conforté par des murs d'escarpe et de contrescarpe. Construit sur des arcs de décharge acceptant la poussée des terres. Depuis le fossé , un escalier pas de souris accède aux places d'armes sortantes et à la butte de tirs réservée à l'infanterie, sur lesquelles ont été aménagés dans les années 40 des emplacements de batteries de défense contre les avions. Le fort fut complété par la construction des batteries basses qui permettaient d'accroître les tirs vers la vallée et de tenir sous des feux de respect le vallon d'Uriage.

Quelques années plus tard, vraisemblablement en 1882, les batteries hautes occupèrent un promontoire qui domine le hameau du Mûrier et pouvaient prendre sous leurs tirs, le plateau de Venon. Enfin, en 1889 fut aménagé, quelques dizaines de mètres avant le dernier virage de la route venant de St Martin d'Hères, le magasin à poudre - caverne, démoli en 1996 en raison de l'effondrement de la chaussée.

La construction du fort avait été confié par le service du Génie à l'entreprise grenobloise
Duc et Cie, qui exerça très longtemps dans la région, et employa au cours des travaux jusqu'à 250 ouvriers, souvent d'origine transalpine. L'entrepreneur, pour satisfaire aux nécessités de la vie, fut obligé de mettre en place une cantine et des baraques logements. Le règlement de ces prestations par les ouvriers s'effectuait, ce qui parait il était plus pratique, avec des jetons délivrés par l'entrepreneur. Cette monnaie dite fiduciaire ou de nécessité, selon la formule utilisée, était frappée pour l'entreprise par Noël Vallet, découpeur et estampilleur de jetons et médailles à Grenoble ce jeton uniface portait le chiffre de l'entreprise "Duc et Cie", l'indication Mûrier et une valeur faciale s'échelonnant de 5 à 30 centimes. On comprend donc tout l'intérêt de ce système pour l'entrepreneur qui était à la fois employeur et prestataire de services.

Reproduction des jetons de paiement des ouvriers qui construisirent le fort.

 

Vue d'une partie de la façade des batteries basses
complètement colonisées par la végétation.

Les travaux cependant, en raison de la médiocrité des matériaux, ne donnèrent pas satisfaction et de nombreux désordres survinrent très rapidement nécessitant des reprises parfois importantes, telle la reconstruction d'une partie du mur d'escarpe Est après son effondrement. De même que la fragilité des pierres conduisit, après la guerre de 1914, le service du Génie à recouvrir par des enduits parfois au mortier bâtard, ce qui était une solution acceptable, mais aussi avec des enduits au ciment artificiel ; ce qui aggravait les désordres, en empêchant la migration des eaux d'infiltration vers l'extérieur. Mais au moment où cela a été fait on pensait agir pour le mieux.

Enfin le creusement des fossés et surtout l'emplacement de l'exutoire des eaux pluviales, qui parfois s'obturait en retenant de grandes quantités d'eau, qui lorsqu'elles faisaient céder le bouchon, se déversaient dans les champs cultivés détruisant tout sur leur passage, suscitèrent de nombreuses demandes d'indemnité de la part des propriétaires lésés.


A gauche, la façade du bâtiment officier. En partie basse, le mur de ronde avec ses multiples embrasures et des meurtrières entourées de briques de fabrication locale. A droite, vue de l'angle gauche du bâtiment "a" surmonté d'une traverse-abri
avant que ne soient entrepris les travaux de réhabilitation.



Fossé du front de tête, avec au premier plan contre le mur de contrescarpe,
l'escalier "pas de souris", un plancher amovible, prenant place entre les deux volées pour en permettre l'usage, débouchait à l'extérieur du fort vers une place d'armes sortante.

L'intérieur de la caponnière double située à l'Est du fort. L'embrasure centrale était destinée à la mise en place d'un canon à balles flanquant le fossé.

La façade du bâtiment "a" dans son état initial avant que ne soit entrepris
les très importants travaux de restauration dont il a été l'objet.

A gauche, carte postale trouvée en Allemagne représentant l'appel des prisonniers en 1916,
à droite, pour ces mêmes prisonniers, ticket de cantine alors en pratique.

Le magasin 11 du bâtiment "d" transformé en local disciplinaire et les graffitis figurant sur les murs de ce local.


Après sa construction, le fort fut affecté à l'artillerie jusqu'en 1915. Sa garnison comprenait 486 soldats - logés par chambres de 40 - 40 sous-officiers et 16 officiers.

L'armement, le plus important des forts protégeant Grenoble, comprenait :

2 canons de 155,
4 canons de 120,
12 canons de 138,
6 canons de 7,
mais également 2 mortiers de 22 et 2 mortiers de 15,
et pour flanquer les fossés, 4 canons à balles de type Reyffe.
Les poudrières contenaient 154.800 kg de poudre et 1.088.600 cartouches confectionnées.

De 1915 à 1918, il servit de dépôt de prisonniers de guerre allemands. Il contenait 128 d'entre eux, alors que l'effectif possible avait été arrêté par l'Etat-major à 200. Ils étaient gardés par une petite unité de territoriaux et certains prisonniers travaillaient dans des fermes du hameau du Mûrier. Ils avaient innové en matière de propreté, puisque à peine installés, ils demandaient et obtenaient l'autorisation de se construire des douches. Avant que ne soient entrepris les travaux de rénovation, il subsistait encore, à proximité de l'accès aux pompes de la citerne, un réservoir en béton qui contenait l'eau nécessaire pour ces douches. Et l'on pouvait encore voir dans les magasins proches de la cuisine, transformés en locaux de punitions, de nombreux graffitis et calendriers, témoignages de leur séjour en ces locaux.

Après la Grande guerre, il sera de nouveau affecté à l'artillerie jusqu'en 1940. Pendant l'occupation, il redevint dépôt de matériel et de munitions et fut gardé par les G.M.R. - Groupe Mobile de Réserve - voir ci-après "La Résistance".

Le 405émé R.A.D.C.A. et ses "canons de 75 contre aéronefs".

Si en 1939, lors de la déclaration de guerre, la sûreté aérienne de Grenoble - qui utilise alors principalement le calibre de 25 mm - est confiée à un régiment d'artillerie anti-aérienne qui dispose ses pièces, en face, au sommet de la Bastille, dans le fort du Mûrier et sur les contreforts du Vercors, dés la fin des années 1930, la crête Est de contre-escarpe reçut 4 canons de 75 mm contre aéronefs, si pour deux de ces pièces il ne reste qu'un encuvement en béton, pour les deux autres une grande partie de l'affût subsiste dans la broussaille

Il s'agissait unitairement de la "plate-forme Raguet" définie en 1915 pour le front du Nord-Est, munie d'un canon de 75mm modèle 1897 modifiée 1915, les batteries de la D.C.A. conservant tels matériels jusqu'en 1940.

D'une portée de 5 500 m en altitude, d'un champ de tir azimutal de 360°, en site de 0 à 90°, aux mains d'une équipe de pièce composée d'un chef et de 8 servants, elle ne pouvait tirer qu'en barrage sur "avion entendu et venant", c'est à dire avec un préavis d'alerte rarement fourni par le guet aérien d'alors ; ainsi trop souvent ces batteries entreront en action sur "avion vu", par rafales, à des altitudes de 2 500 à 3 000 m, sans possibilité de correction de trajectoire vu la médiocrité de leurs qualités balistiques contre des objectifs volant à plus de 400 Km/h.

Les "canons de 75 contre aéronefs".

Si en 1939, lors de la déclaration de guerre, la sûreté aérienne de Grenoble - qui utilise alors principalement le calibre de 25 mm - est confiée à un régiment d'artillerie anti-aérienne qui dispose ses pièces, en face, au sommet de la Bastille, dans le fort du Mûrier et sur les contreforts du Vercors, dés la fin des années 1930, la crête Est de contre-escarpe reçut 4 canons de 75 mm contre aéronefs, si pour deux de ces pièces il ne reste qu'un encuvement en béton, pour les deux autres une grande partie de l'affût subsiste dans la broussaille

Il s'agissait unitairement de la "plate-forme Raguet" définie en 1915 pour le front du Nord-Est, munie d'un canon de 75mm modèle 1897 modifiée 1915, les batteries de la D.C.A. conservant tels matériels jusqu'en 1940.

D'une portée de 5 500 m en altitude, d'un champ de tir azimutal de 360°, en site de 0 à 90°, aux mains d'une équipe de pièce composée d'un chef et de 8 servants, elle ne pouvait tirer qu'en barrage sur "avion entendu et venant", c'est à dire avec un préavis d'alerte rarement fourni par le guet aérien d'alors ; ainsi trop souvent ces batteries entreront en action sur "avion vu", par rafales, à des altitudes de 2 500 à 3 000 m, sans possibilité de correction de trajectoire vu la médiocrité de leurs qualités balistiques contre des objectifs volant à plus de 400 Km/h.

En haut, exemples du canon de 75 contre aéronefs,
en bas les restes des affûts de ceux du Mûrier - Alpyfort.

Le 1er janvier 1924, le 5ème R.D.C.A. - régiment de D.C.A. de l'Aéronautique, qui avait été formé en 1922 - donne naissance au 405éme Régiment d'Artillerie de Défense Contre Aéronefs - R.A.D.C.A. - créé à Sathonay.

A la mobilisation le 405éme R.A.D.C.A. donne à son tour naissance à de très nombreux Groupes et batteries de D.C.A..

En 1940, le 405éme R.A.D.C.A. est partout où la menace pèse.



A gauche insigne du 405éme R.A.D.C.A. de 1935, à droite de 1937

Il participe à la défense improvisée de Lyon à Chasselay les 19 et 20 juin 1940, sur une ligne de combat allant de l'Arbresle à Fontaines-sur-Saône, avec comme points forts les hauteurs qui dominent Chasselay et le château-couvent de Montluzin, 180 soldats appartenant aux 7ème et 25ème régiments de Tirailleurs Sénégalais, au 405éme R.A.D.C.A. et à la Légion étrangère sont tués en s'opposant aux 25.000 hommes des colonnes blindées de la Wehrmacht. À la fin des combats a lieu le massacre par les Allemands des prisonniers et l'achèvement des blessés.

Le régiment est dissous en juillet 1940.

Les unités de D.A.T. - Défense Aérienne du Territoire - autorisées en août 1940 par les Commissions allemande et italienne d'Armistice pour la défense de la zone non-occupée - 14ème et 15ème Divisons militaires - portent le numéro 405 sans pour autant que le régiment ait été reconstitué. Elles forment 9 groupes de D.C.A., numérotés de 36/405 à 44/405 qui sont dispersés et dissous le 27 novembre 1942, lors de l'invasion de la zone libre.

En 1940, quant aux unités des batteries de D.C.A. sur 75 semi fixe, issues du
45ème groupe du 405ème R.A.D.C.A., se trouvaient autour de Grenoble :

la 133ème batterie, formée le 24 août 1939, dissoute le 07 août 1940, située au Fort du Mûrier d'août 1939 à juin 1940.
la 134ème batterie, formée le 22 août 1939, dissoute le 07 août 1940, située au Fort de la Bastille, même période.
la 135ème batterie, formée le même jour, dissoute le même jour en position à Sessiney.

La Résistance.

Au début de l'année 1944, le 4 janvier, les nazis, las des actions de résistance de ce secteur, encerclèrent le hameau du Mûrier et après avoir rassemblé tous les habitants valides effectuèrent plusieurs tris parmi les hommes dont une trentaine furent amenés au fort. Après une nouvelle sélection, une douzaine parmi les plus jeunes seront retenus et embarqués via Compiègne pour les camps de la mort, d'où cinq d'entre eux ne devaient pas revenir.
 
En pèlerinage au fort où il furent rassemblés les résistants se souviennent. De gauche à droite : Marcel Chabloz, Jules Chabloz, André Chapey, Camille Armand, Pierre Chabloz et Victor Platel

On ne peut évoquer le fort du Mûrier en passant sous silence le coup de main entrepris le 11 juillet 1944 par un groupement composé de résistants de l' A.S. - Armée Secrète - et les 5 et 9ème bataillons M.O.I. - Mouvement Ouvrier Immigrés - comprenant pour la plus grande partie des combattants étrangers ayant fui le fascisme installé dans leur pays tels les Espagnols, Italiens, Polonais, Hongrois… L'opération envisagée, qui devait vider de son contenu le magasin à poudre caverne, gardé par les G.M.R. - Groupe mobile de réserve était nécessitée par le besoin en explosif des groupes francs de manière à pouvoir continuer des activités de sabotage contre les troupes ennemies.

Elle fut dirigée par Aimé Requet et y participèrent le groupe F.T.P. Dalmasso du secteur de Luytel, le groupe franc Petit Louis ainsi que le groupe Gamard de St Martin d'Hères. En tout une soixantaine d'hommes et une dizaine de camions, 6 venant de Domène et le reste par Herbeys. Après la constitution de quelques groupes de couvertures laissés aux points stratégique, le gros de la troupe se regroupa au hameau du Mûrier. Aimé Requet décida alors de la tactique à employer et envoya par les champs, avec mission de rester silencieux jusqu'à un signal convenu, trois résistants armés de fusils mitrailleurs, le reste des groupes francs gagnant tout aussi discrètement les taillis en dessous de la route face à la porte du magasin caverne. Il se présente alors à la porte et demande au nom de la résistance que lui soit livré les explosifs, comme son interlocuteur le menace de tirer, il s'écrie : "Tireurs prêt". Les trois résistants se dressent alors au dessus du magasin, le fusil mitrailleur à la hanche, les G.M.R. comprennent qu'ils sont pris et laissent faire le groupe franc qui peut alors charger les camions des explosifs du magasin caverne.

Cependant que les camions sont prêts à partir, le chef de groupe de couverture fait prévenir que des G.M.R. se sont postés sur un lacet de la route dans l'attente d'intercepter le convoi. Bien qu'il existe alors d'autres possibilités, le choix le meilleur apparaît comme étant d'aller au devant des G.M.R. et après avoir dissimulé des groupes francs dans une camionnette, Requet refait pratiquement la même action qu'à la poudrière et réussit à faire désarmer les soixante G.M.R. par le groupe des F.T.P. de Luytel et le groupe franc Henri. Ce coup de main qui avait en tout point réussi, puisque le convoi chargé de 30 tonnes d'explosifs divers ainsi que de l'armement et des armes individuelles enlevées au G.M.R. traversa Gières, Murianette et Domène sans incidents, fut malheureusement endeuillé par la mort de deux résistants, appartenant à des groupes laissés en couverture, qui furent abattus au cours de leur décrochage par les troupes Allemandes, prévenues par le fort et accourues en renfort. Un autre résistant sera capturé par les miliciens près du Versoud, il sera déporté et ne reviendra qu'en 1945.

A la fin des hostilités en 1944, le fort servit de dépôt de matériel, puis il fut totalement désaffecté et vendu à la ville de Gières en 1977. Depuis cette année là, sous l'égide de la municipalité de cette ville, une association a vu le jour avec pour mission d'assurer en priorité sa survie. Et c'est par la présence d'artistes : peintres, sculpteurs, céramistes, que le fort a été protégé du vandalisme. Cette sauvegarde étant effective, il importait en raison de la qualité de ses formes, de lui trouver de nouvelles activités.

La photographie de gauche montre l'importance des travaux de restauration entrepris au fort du Mûrier et des choix qui ont été faits pour le rendre utilisable, sans danger pour les usagers. C'est ainsi que les façades des bâtiments "a" et "e"constituées de voiles, dont les pierres se désolidarisaient et tombaient , ont été démolis, et reconstruites en béton, alors sans doute que d'autres solutions étaient possibles.

Bien après qu'il ait été acheté par la ville de Gières, l'association des "Amis du fort" recevait volontiers le Génie de Grenoble. C'est ainsi qu'en 1990 se déroula une cérémonie de passation de pouvoirs entre deux Directeurs de travaux de l'établissement du Génie.

A gauche l'intérieur de l'une des casemates transformée en atelier pour artistes. A droite à l'intérieur de la poudrière de droite - aujourd'hui transformée en salle d'exposition permanente pour les artistes travaillant au fort - inauguration de l'exposition sur les forts de Grenoble au XIX° siècle et plus spécialement sur le fort du Mûrier.



Jean Azeau.
Compléments et mise en forme de S. Pivot.

 
 

 
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